dimanche 14 février 2016

#3 Parce que ma Guyane est belle

 Coucher de soleil du côté de l'île Royale



Littérature : La Guyane et le bagne



       J’ai eu l’occasion de lire quelques ouvrages du journaliste Albert Londres. J’annonce la couleur, j’ai beaucoup aimé. Un de ces livres portait sur le Guyane avec ce doux et merveilleux titre Au bagne. C’est clair, personne ne s’attend à une intrigue captivante avec un titre pareil ni à une épopée épique. Il s’agit d’un reportage, d’un réquisitoire accablant contre le bagne. Vous serez seulement confrontés à la misère et la souffrance humaine, doublé d’un portrait peu avenant d’une Guyane encore à 99 % sauvage avec des infrastructures rudimentaires quand elles existent. 

     De la forêt, le bagne, Cayenne et Saint-Laurent encore à l’état de villes insalubres dépourvues de tout, le bagne en forêt, les îles du Salut…les Amérindiens ? Connais pas. Les descendants d’esclaves, on en voit un ou deux, souvent au service de l’administration pénitentiaire. Et de la souffrance, encore et inlassablement. Des bagnards aux pieds rongés par les chiques, les araignées de mer et les maladies comme l’ankylostomiase, le regard vide et abattu, amaigris par maintes maltraitances et affamés, toujours. Leur espoir : s’évader vers les îles caribéennes plus clémentes où au moins ils auront du travail comme Trinidad.


 Je vais faire ma fainéante et vous laissez découvrir l’écriture de Londres :

« Le bagne, le vrai

La Guyane est un pays inhabité. Son territoire fait le tiers de la France (note perso : c’est vous dire si on a perdu pas mal de km²), mais elle n’a que vingt cinq mille habitants – encore quand on compte avec amitié. Le Guyanais qui va se promener prend son fusil comme nous notre parapluie […]
Repartons.
Toujours des pri-pri, toujours des savanes tremblantes. Nous arrivons au kilomètre 24. C’est le bout du monde.
Et pour la première fois, je vois le bagne !
Ils sont là cent hommes, tous la maladie dans le ventre. Ceux qui sont debout, ceux qui sont couchés, ceux qui gémissent comme des chiens.
La brousse est là devant eux, semblable à un mur. Mais ce ne sont pas eux qui abattront le mur, c’est le mur qui les aura. […]
Vingt-quatre kilomètres en soixante ans ! Dans quatre siècles, nous aurons probablement réuni Cayenne à Saint-Laurent-du-Maroni, et ce sera magnifique encore !...
Pourtant, la question serait de savoir si l’on veut faire une route ou si l’on veut faire crever des individus. Si c’est pour faire crever des individus, ne changez rien ! Tout va bien ! Si c’est pour faire une route… »



J’aime l’ironie et le sarcasme qui sont la marque de fabrique de Londres.

L’existence du bagnard se résout à deux choses : vivre au bagne et avoir au moins un toit et de la nourriture, si peu soit-elle, ou être libre et se retrouver livrer à lui-même tant les options sont maigres dans le paysage économique guyanais du début du XXe siècle. Londres vous racontera qu’à Saint-Laurent, des bagnards vont jusqu’à projeter de voler sachant que le cas échéant ils n’auront rien dans le ventre le soir venu. D’autres complotent pour tuer un homme dans l’espoir de retourner au bagne. Ils en sont venus à envier les malades envoyés à l’hôpital… Une phrase pour résumer leur état d’esprit : « Ce qui serait une catastrophe pour un homme libre, pour nous est un bonheur. »


C’est aussi une terre d’injustice où l’administration pénitentiaire est toute puissante…

« Motifs de punitions :
A excité ses camarades à l’hilarité par son bavardage continuel pendant la sieste : trente jours de cachots. […]
A accusé un surveillant de lui avoir volé deux francs : trente jours de cachots. […]
A forcé le guichet de sa cellule, passé sa tête et crié : « une autre punition, s’il vous plaît ! » : trente jours de cachot. »

« Alors les médecins ?
Les médecins sont écœurés. Les témoins les plus violents de l’administration pénitentiaire se trouvent parmi eux.
Le médecin voit l’homme. L’administration voit le condamné. Pris entre ces deux visions, le condamné voit la mort.
-          Mille bagnards meurent par an. Ces neuf cents mourront.
-          Mais c’est long, monsieur, me dit celui-là, né à Bourges, c’est long !… long !… »


Vous noterez que c’est une bien pauvre critique littéraire. En ce cas, je n’ai pas de références auxquelles vous renvoyer.

Nub' Dee.


#4 Manjé pou zot bin' bèl

Vous avez compris maintenant que les Nubiennes adorent manger : aujourd'hui c'est au tour des sispas !


Il s'agit d'une petite galette composée de manioc et de noix de coco mélangés à des épices ; un petit saut sur la platine et hop voilà des sispas ! 


Bon j'avoue celle que j'ai mangé était très fine et assez sèche, i té ka graw graw graw anba mo den mais bon, ça faisait longtemps que je n'en avais mangé, je n'ai pas fait la difficile. D'habitude les sispas sont quand même plus épaisses. 



Avec gourmandise, les Nubiennes

mercredi 21 octobre 2015

Parce que les chants folkloriques créoles me font délirer

     Mes souvenirs en rapport avec les chants traditionnels remontent à la primaire. J’ai pris conscience des années plus tard que je chantais vraiment du n’importe quoi. Entendons-nous bien, quand je dis « chanter du n’importe quoi », cela signifie ne rien comprendre à ce qu’on dit. Le plus étrange dans cela est que je connaissais les paroles, je les répétais mais de toute évidence mon cerveau ne pigeait rien à leur sens véritable. Je ne vois pas comment expliquer ce phénomène autrement. Je me suis aussi rendue compte que certaines chansons avaient leur quota de grivoiserie. Je vous laisse les découvrir et vous m’en direz un mot.

Pour le grajé, nous avons :

Soliste : Mo alé ofon gran bwa an proménad, ké to tonton mo do servi kabann pou yo
Chœurs : Jènn jen rasazié,
Soliste : Zot emerdé
Chœurs : Jènn jen rasazié,
Soliste : Parlez-moi des étrangers
Chœurs : Jènn jen rasazié,

Soliste : Tandé palé di razazié, tandé palé di emerdé, yé roulé to anba danbwa.
Chœurs
Soliste : Fèy patawa té to zorié
Chœurs
Soliste to kalé a gran danbwa, mo bité ké to manman, to papa té roulé to
Choeurs
Soliste : Mèm komou servi matla
Chœurs

Euh « roulé » ne signifie ici ni conduire, ni prendre des coups, ni rouler d’ailleurs.

Bon ici de toute évidence, une jeune femme a eu des expériences sexuelles à tendance incestueuse. L’auteur de la chanson ne nous dit pas si elles étaient consenties. En tout cas, il est au courant ou du moins prétend savoir quelque chose (les cancans ont la vie dure) et comme c’est souvent le cas avec les chansons de grajé, tout le village est désormais au courant parce que le partage est une valeur essentielle dans cet univers. Pour ajouter au pittoresque, les règlements de compte ça se fait en chantant, histoire de rendre les choses plus conviviales, vous voyez…

Pour le kasékô (d’ailleurs je trouve que c’est plutôt dans ce genre qu’on en trouve le plus).

Soliste : lolo mol pa ka lévé
mo jwè ké lolo, karésé lolo
Chœurs : lolo mol pa ka lévé.

Soliste : dorloté lolo, karéssé lolo
Chœurs : lolo mol pa ka lévé.

Soliste : a 5 hèr d’matin mo soukré lolo.
Chœurs : lolo mol pa ka lévé.

Soliste : a 6 hèr d’matin mo jwè ké lolo.
Chœurs : lolo mol pa ka lévé.

Soliste : karésé lolo, lolo pa lé lévé.
Chœurs : lolo mol pa ka lévé.

Franchement, vayan fanm : branler un homme deux heures durant dans l’espoir qu’il ait une érection de deux choses l’une, ou elle avait sacrément envie et hors de question de lâcher l’affaire ou c’était une femme soumise et son homme la forçait à continuer. Je ne vois que ça pour mettre autant d’énergie et d’imagination pour faire bander un mec. En plus elle n’est même pas récompensée pour ses efforts…i dèt alé dronmi tout’ so visaj maré, podjab.

Roulé an nou alé

Soliste : roulé, mouché an nou alé, mouché la ou kontan mo pou danbwa
Mouché la ou kontan pou danbwa, mouché la ou kontan mo pou laro
Chœurs : wééé mouché an nou alé, mouché la kontan mo pou danbwa

Soliste : mouché la ou kontan mo pou danbwa, pa mèm dansé ou ja minnin mo
Chœurs : wééé mouché an nou alé, mouché la kontan mo pou danbwa

Je me devais de mettre cette chanson-ci juste pour vous faire remarquer que de toute évidence la forêt était l’équivalent du stade de Baduel à l’époque. D’après ce que j’ai compris des paroles, cette femme en a assez d’être reléguée au rang de la nana qui n’est bonne qu’à ouvrir ses cuisses, en plus dans les bois ! Genre, le gars n’a même pas un lit à lui proposer. Le crevard ! Je vous demande vingt secondes de silence pour cette malheureuse qui a dû se faire dérailler par les moustiques…

Pour le kamougué
ti mano, do do dokéwa

Soliste : ti mano do do dokéwa. Dokéwa dokéwa
Choeurs : ti mano do do dokéwa

Soliste : Mo manyin so tété i tiré mo lanmin
Choeurs

Soliste : Mo manyin so bagaj i jouré mo manman
Choeurs

Ce doit être la seule chanson à caractère sexuel que j’ai trouvé dans ce rythme. En même temps, vous vous baladez dans mon répertoire qui n’est pas forcément le plus fourni qui soit. C’est une thématique que l’on retrouve assez souvent : les hommes aux mains baladeuses et qui se font généralement injurier proprement. Zafè yé tchiou, yé té na ka léssé yé lanmin an yé poch, lanmine. 

Si vous en connaissez d'autres, n'hésitez pas à partager. 

Nub’ Dee

samedi 12 septembre 2015

Un peu de zik


Les Nubiennes sont allées voir Magic Mike XXL. Il nous en faut peu pour être heureuses. Mais soyons honnêtes, nous n'y sommes pas allées pour la complexité et la profondeur du scénario; d'autant qu'il n'y en avait pas donc ça c'est réglé. Les scènes de strip tease furent...intéressantes hein. Passons, nous avons beaucoup aimé certaines chansons du film. Nous les partageons avec vous.






dimanche 12 juillet 2015

On aime les maripas

" Attalea Maripa est une espèce de palmiers de la famille des Arecaceae originaire d'Amérique du Sud et..." bla bla bla bref ce sont des maripas et nos papilles n'y résistent pas.



 On retire la coque et l'écorce des maripas avec les dents. Nan nan point de couteau dans cette histoire, à moins d'avoir du temps à perdre et vous l'aurez deviné, nous n'en avons pas. Sus aux maripas !

 Etant des fruits sauvages (nous ne connaissons pas de plantations de maripas en Guyane), il y a des risques pour que les maripas ne soient pas tous comestibles. Vous trouverez souvent des parties pourries et oh surprise, un petit ver blanchâtre, que fais-tu là ? N'allez pas croire que ça coupe notre faim. On passe au suivant...

Si vous êtes du genre Mac Gyver, vous pouvez improviser une toupie avec la coque. Il suffit de percer un trou dans le fond et d'y glisser une allumette par exemple. A pa kouyénad nou ka rakonté, i ka maché !

Avec gourmandise, les Nubiennes

#3 Parce que ma Guyane est belle

Il suffit de circuler sur les routes pour voir ces paysages où la forêt frôle le bas-côté de latérite.



Les Nubiennes